Vols dans les marchés en période de fêtes : Les « Driankés » au banc des accusés
De l’ambiance, il y en a au marché Hlm 5 de Dakar, qui vit depuis quelques jours au rythme des préparatifs de la Tabaski prévue mercredi prochain. Les marchandages sont vifs et serrés entre vendeurs et acheteurs dans un bruit assourdissant provoqué par la musique qui retentit de partout. Mais derrière cette atmosphère de fête, il y a la hantise des voleurs. Reportage !
17 heures passées ce jeudi 15 juillet 2021, le marché Hlm 5 de Dakar est noir de monde. Malgré la chaleur suffocante, l’ambiance est à son comble, comme lors des veilles des grandes fêtes religieuses. Vendeurs, acheteurs, jeunes curieux, dans un charivari monstre, se disputent inlassablement la grande artère qui longe ce grand centre commercial. Ici, la recrudescence des cas de vols préoccupe à bien des égards commerçants et clients. Tous pointent du doigt les « Driankés ». D’ailleurs, la semaine passée, une mère de famille de 46 ans a été condamnée par le Tribunal des flagrants délits de Dakar pour vol de coupons de tissus au marché Hlm. Quelques jours auparavant, une autre dame a été également condamnée pour des faits similaires commis au marché « Okass » de Touba.
Des habits amples pour dissimuler les objets dérobés
Propriétaire d’une grande boutique au marché Hlm, Bamba Seck, 40 ans, explique sa mésaventure avec une cliente bien particulière. « La semaine dernière, une dame d’environ cinquante ans est venue ici, dans ma boutique, pour acheter des tissus. Elle portait un grand boubou, de beaux bijoux qui ressemblaient à de l’or, un foulard à la tête, bref une « drianké ». Quand elle est arrivée, elle m’a dit qu’elle voulait des « Thioub » getzner de préférence, je lui ai proposé des coupons de trois pièces (boubou, foulard et pagne) qui coûtent presque 100000 F Cfa chacun. Elle m’a demandé de lui en montrer d’autres, quand je me suis retourné pour lui chercher les tissus, la dame a dissimulé un coupon dans son grand boubou », raconte-t-il, ébahi. Ce commerçant, originaire Kaolack, ajoute : « Comme vous voyez, j’ai quatre employés dans la boutique mais ils n’ont rien vu, ils étaient tous occupés. Mais, c’est ma sœur Arame, la caissière, qui me la signalé, j’étais surpris parce que je ne pensais pas qu’une femme comme elle pouvait voler. Puisque la caisse est en vitre teinté la dame ne savait peut-être pas qu’il y avait quelqu’un ». B. Seck soutient avoir ensuite demandé à la dame de lui remettre le tissu qu’elle avait pris, mais celle-ci a tout nié en criant sur tous les toits qu’elle n’était pas une voleuse. Toutefois, elle sera confondue par les caméras de surveillance. « C’est ainsi qu’elle a accepté de rendre le tissu. Elle m’a supplié de la couvrir pour l’amour de Dieu et vu qu’elle avait presque l’âge de ma mère, je l’ai laissée partir », indique Bamba Seck.
À l’en croire, ce ne sont pas seulement les jeunes garçons qui ressemblent à des bandits qui commettent des vols, certains adultes hommes et femmes qui ont l’air correct, sont beaucoup plus professionnels.
Allant plus loin, Khadim Thiam, marchand ambulant, révèle que les femmes sont les « pires voleuses ». Celles-ci, jure ce jeune Dakarois, « sillonnent le marché, bien habillées, et quand on les voit, on ne peut pas s’imaginer qu’elles sont des voleuses. Il y en a qui portent des habits amples pour cacher les objets. D’autres portent des pagnes et un pantalon serré à l’intérieur pour y mettre ce qu’elles ont dérobé ».
Ce que confirme Mariéme Diop, autre vendeuse de tissus établie dans ledit marché. Selon elle, à l’approche de l’Eid-El-Kébir, il y a une recrudescence des vols par rapport au reste de l’année. « Chaque jour, plusieurs personnes sont dépouillées de leurs biens. Autour de nous, on signale de temps à autre des cas de vols. Car moi-même, j’en ai été victime », témoigne-t-elle. De l’avis de cette habitante des Parcelles Assainies, les vendeurs rivalisent pourtant d’ingéniosité pour ne pas se faire surprendre par les voleurs. « On est obligés d’être sur nos gardes toute la journée, parce que les voleurs repèrent quand on est occupés. C’est pourquoi, il faut toujours être attentif », conseille-t-elle.
Caméras de surveillance, gros bras…
Mais en réalité, les commerçants ne sont pas les seules cibles des voleurs. Les clients aussi en sont victimes. Aida Ndiaye, la quarantaine, le masque bien ajusté, se rappelle: « Un jour, j’ai acheté des chaussures, des voiles pour ma fille, un sac à main, un coupon de tissu pour ma mère, une valeur de presque 40.000 F Cfa. Arrivée dans une autre boutique, j’ai posé le sachet à côté de moi, quand j’avais fini d’acheter mes produits, je n’ai pas retrouvé mon sachet. Quelqu’un l’avait pris à mon insu. Quand j’ai demandé, on m’a dit qu’une femme a pris un sachet qui était à côté de moi et est sortie de la boutique, jusqu’à présent, je n’ai pas retrouvé la dame ». La jeune cadre de l’administration, bouillante de colère, ajoute que « les gens sont tellement malhonnêtes de nos jours et c’est difficile de perdre son argent comme cela alors qu’on a travaillé dur pour l’obtenir ».
Pour faire face à cette situation, beaucoup de commerçants ont déjà pris leurs précautions en installant par exemple des caméras de surveillance ou en recrutant des gros bras pour sécuriser leurs établissements. C’est le cas de Makhtar Séne, vendeur de bijoux au marché Hlm. « En plus des caméras de surveillance, j’ai recruté un homme pour surveiller, au cas où il y aura la présence de personnes suspectes dans mon magasin », dit-il, préoccupé à livrer des commandes. « Durant cette période, il y a plus de monde. Donc, on est vigilants », rembobine ce « Baol-Baol ».
Les commerçants rencontrés attirent l’attention des services de sécurité pour un renforcement du contrôle surtout durant la semaine à venir. « La Police doit prendre des dispositions drastiques pour garantir la sécurité des biens et des personnes à l’approche de la fête de Tabaski », suggèrent-ils, à l’unanimité.